Ifosfamide

L'ifosfamide est comme le cyclophosphamide un agent alkylant de la famille des moutardes azotés, utilisé principalement en chimiothérapie pour traiter divers types de cancers, y compris les sarcomes, les lymphomes et certains cancers testiculaires. La plupart des études de toxicité sont en relation avec des populations pédiatriques.

L'ifosfamide est une prodrogue qui est métabolisée par les cytochromes P450 3A4, 3A5 et 2B6 hépatiques et rénaux.  Elle est transformée par différentes voies :

  • hydroxylation qui produit le 4-hydroxy-ifosfamide, puis l’aldo-ifosfamide spontanément converti en ifosfamide moutarde, qui constitue l’agent alkylant responsable de l’efficacité thérapeutique (formtion de liaison covalente avec certaines bases puriques) et en acroléine urotoxique.
  • déchloroéthylation qui aboutit à la synthèse du déchloroéthylifosfamide et du chloroacétaldéhyde néphrotoxique et la neurotocicité.

 

Toxicité neurologique

Survient chez 10 à 30 % des patients ; le chloroacétaldéhyde provoquerait une déplétion en glutathion responsable d’un défaut de détoxication cérébrale et une inhibition de la bêta oxydation des acides gras à chaîne longue.

Signes cliniques :

  • Encéphalopathie:

Symptômes allant de la somnolence et de la confusion légère à des troubles graves tels que l'agitation, les hallucinations visuelles, les mouvements anormaux (tremblements, myoclonies), des convulsions et le coma.

  • Autres signes neurologiques:

  • Ataxie cérébelleuse (perte de coordination)
  • Dysarthrie
  • Neuropathies périphériques avec paresthésies

Traitement

Bleu de méthylène : 50 mg toutes les 4 h jusqu'à résolution des symptômes.

Prévention :

Bleu de méthylène : 50 mg toutes les 6 h pendea,t 24 heures (4 injections).

Toxicité vésicale

Signes cliniques :

  • Cystites hémorragiques :

La toxicité reliée à l’acroléine dont le contact direct avec la muqueuse urothéliale conduit à un œdème, une ulcération, une néovascularisation, une hémorragie et finalement une nécrose :

Prévention :

  • Hyperhydratation
  • Administration systématique de 2-mercaptoéthane-sulfonate de sodium (chélateur de l’acroléine).
    • 60 % de la dose administrée d'oxazaphosphorines (cyclophosphamide, ifosfamide).

    • Administration intraveineuse discontinue, après dilution :

      • un tiers de la dose dès le début de l'administration de l'oxazaphosphorine,

      • second tiers 4 heures plus tard,

      • dernier tiers 4 heures plus tard (soit 8 heures après la première administration).

    • Administration intraveineuse continue

      • débutant ¼ d'heure avant la perfusion chimiothérapique et se prolongeant 8 à 12 heures après la fin de celle-ci, la dose totale de mesna atteignant (voire dépassant) 100 % de la dose d'oxazaphosphorine utilisée.

Toxicité rénale

La présence de cytochromes P450 3A4, 3A5 et 2B6 dans les cellules rénales humaines nécessaires au métabolisme de l’ifosfamide et à la synthèse du chloroacétaldéhyde aboutit à des concentrations intratubulaires toxiques de chloroacétaldéhyde.

Le chloroacétaldéhyde provoque une diminution des concentrations intra-cellulaires de glutathion, une augmentation de la peroxydation des lipides et une diminution de l’activité thyrédoxine réductase, ce qui augmente la sensibilité cellulaire au stress oxydatif. Il joue également un rôle en altérant le métabolisme énergétique des cellules tubulaires engendrant des tubulopathies et dans les formes avancées une nécrose de la cellule.

En régle générale, la réversibilité des lésions est mauvaise et le pronostic fonctionnel souvent engagé.

Signes cliniques :

Tubulopathies du tube contourné proximal (Syndrome de Fanconi) : fréquent et séquellaire dans les populations pédiatriques.

Insuffisance rénale aigue dans les suites de l'injection progressant vers l'IRC dans 1/3 des cas malgré l'arrêt du produit.

Insuffissance rénale lente et progressive pouvant être décalée jusqu'à 48 mois conduisant à une insuffisance rénale chronique.

 

 

 

Prévention :

  • L'hyperhydratation reste la seule option validée
  • La corticothérapie utilisée dans des cas rapportés est inefficace.
  • Le 2-mercaptoéthane-sulfonate n'agit pas à ce niveau de toxicité
  • Plusieurs molécules à visée préventive ont été essayées sans preuve formelle d'efficacité :
    • amifostine (donneurs de radicaux thiols)
    • antioxydants (resvératrol, mélatonine, thymoquinone, taurine, glycine et la L-histidinol ou la N-acétylcystéine).

Curatif :

  • La corticothérapie à visée curative, utilisée dans des cas rapportés est inefficace.
  • La N-acétylcystéine a été utilisée en rescue sans certitude.

Bibliographie

Ensergueix  G.; Karras A. (2018). Néphrotoxicité de l’ifosfamide. Néphrologie & Thérapeutique, 14(), S125–S131. doi:10.1016/j.nephro.2018.02.008

Pelgrims J Methylene blue in the treatment and prevention of ifosfamide-induced encephalopathy: report of 12 cases and a review of the literature. Br J Cancer. 2000 Jan;82(2):291-4.doi: 10.1054/bjoc.1999.0917

 

Date de dernière mise à jour : 30/08/2024

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